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COP28 : « Il faut éviter que les discours sur l’urgence climat ne fassent monter des lignes de division »

L’idée selon laquelle « il faut limiter le réchauffement à 1,5 °C sinon c’est la catastrophe », traduite en objectif de neutralité carbone en 2050 pour tous les pays tous secteurs confondus, a eu le mérite de déclencher un cycle d’alertes, de dénonciations de l’inaction et d’annonces volontaristes des pouvoirs publics. Mais, devant les retards de mise en œuvre dus aux difficultés d’embrayage des acteurs de terrain, et l’écart croissant entre affichage des ambitions et réalité, un vent contraire s’est levé sur l’air de « personne ne veut (ou ne peut) payer la facture ».
Il faut désormais revenir à ce que dit vraiment le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) pour éviter que les discours sur l’urgence climat ne fassent monter des lignes de division paralysantes (nucléaire contre éoliennes, sobriété vue comme faux nez de l’austérité, crispations autour de la viande ou des vols aériens), ou encore des insinuations sur une dictature verte au nom de la « fausse science » du GIEC. En fait, l’opinion, qui oscille entre écoanxiété, désir de changement et résignation, reste majoritairement dans l’attente de politiques crédibles et ambitieuses.
Dans son sixième rapport, le GIEC explique que le changement climatique cause déjà des dommages substantiels pour les écosystèmes, la santé humaine et la sécurité alimentaire, et que tout dixième de degré supplémentaire compte. Il conclut que les coûts globaux d’une stabilisation du réchauffement à + 2 °C, qui implique une neutralité carbone vers 2075, sont largement justifiés par les dommages évités.
Mais il ne se prononce pas sur un tel ratio coût-bénéfice pour des plafonds inférieurs de température. Dans son rapport spécial 1,5 °C, il indiquait, en revanche, que cet objectif exigerait un prix du carbone aligné sur la vérité des coûts trois ou quatre fois supérieurs en 2030 à celui exigé par 2 °C, soit 370 à 500 euros par tonne de carbone dans tous les pays. Un choc que les pays pauvres ne sauraient absorber par de simples transferts financiers, même généreux. D’autant que la moyenne des scénarios à + 2 °C, comme ceux visant + 1,5 °C, donnent un même pic de température de + 1,7 °C, avant un retour à + 1,6 °C et à + 1,4 °C respectivement en 2100.
Le piège serait de tirer de cette extrême difficulté à stabiliser le réchauffement à + 1,5 °C une mise en scène opposant ceux qui veulent tenir bon sur 1,5 °C pour être sûr de rester sous les 2 °C, à ceux qui estiment que nous avons encore vingt-cinq ans pour ne pas dépasser + 2 °C. Mais nous ne sommes pas dans une négociation où les syndicats demandent au patronat une hausse de 30 % pour obtenir 10 % !
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